Le bail dérogatoire n’est ni un bail commercial, ni un bail précaire

Les principales caractéristiques du bail dérogatoire sont :

– durée minimale : NON

– durée maximale : OUI (3 ans)

– droit au renouvellement : NON

Ainsi, le bail dérogatoire permet au commerçant de tester son activité sans engagement dans la durée vis-à-vis de son bailleur. Il permet également au bailleur de maîtriser son patrimoine.

QUID DU SILENCE A L’ARRIVEE DU TERME ?

En cas de silence des parties à l’arrivée du terme, l’occupation par le locataire se poursuit sous le statut de baux commerciaux et lui confère donc la propriété commerciale, avec le droit au renouvellement. Le bailleur perd donc la maîtrise de son patrimoine.

Notre conseil pour le bailleur : avant l’arrivée du terme, le bailleur doit faire signifier par huissier au locataire un « congés-avertissement » ou « sommation de déguerpir ». En effet, la Cour de cassation considère que lorsque le bailleur a, avant le terme du bail dérogatoire, délivré congé au preneur pour cette date, la renonciation du bailleur à son droit de demander au locataire de quitter les lieux ne peut se déduire de son silence ou de sa seule inaction postérieure.

Notre conseil pour le locataire : gardez le silence !

L’Acte d’Avocat électronique (AAe) : un outil parfaitement adapté pour assurer la poursuite de la vie des affaires en cette période de crise sanitaire

L’ordonnance du 22-04-2020 prévoit, dans le cadre de la lutte contre le Covid-19, de dématérialiser les formalités auprès des CFE (Ord. n° 2020-460 du 22-04-2020, art. 2)

Voici l’occasion pour nous de mettre en valeur l’Acte d’Avocat électronique (AAe), outil déployé par la plateforme eBarreau, entièrement sécurisé et simple d’utilisation.

Depuis plus d’un an, nous proposons cet accès entièrement dématérialisé :

1/ la convention d’honoraires est signée à distance

2/ le rendez-vous client est fait par visio-conférence

3/ les contrats d’affaires sont rédigés, négociés et signés à distance

Pour une vidéo explicative, rendez-vous sur le site du CNB : https://www.cnb.avocat.fr/fr/acte-electronique-comment-ca-marche

La question épineuse du transfert international des données (arrêt Schrems II – CJUE 16 juillet 2020)

Aujourd’hui, la question du transfert international des données et notamment de son régime, est l’une des plus sensibles d’un point de vue juridique.

En témoigne l’arrêt de la Cour de Justice de l’Union Européenne (CJUE) du 16 juillet 2020, lequel invalide d’abord le « Privacy Shield », dénommé également « Bouclier de protection des données », puis confirme la validité des clauses contractuelles types.

En effet, la Commission Européenne a la faculté de prendre une décision d’adéquation dans laquelle elle apprécie, au cas par cas, pour un Etat donné se situant en dehors de l’Union Européenne, si ce dernier accorde des garanties équivalentes, en matière de traitement des données, à celles offertes sur le territoire de l’Union Européenne.

Parmi ces décisions d’adéquation, l’une concerne les États-Unis : le « Safe Harbor ». Dans ce cadre, lorsque les données d’une entité de l’Union Européenne étaient transférées, puis traitées aux États-Unis, elles devaient être conformes aux conditions et garanties accordées au sein de l’Union.

Le « Safe Harbor » avait fait l’objet d’un contentieux, lequel avait donné lieu à un arrêt « Schrems » du 6 octobre 2015, au sein duquel la CJUE invalide le « Safe Harboor », jugeant que les conditions que devaient remplir la décision d’adéquation n’étaient plus remplies, causant ainsi la disparition de ce dernier.

Aux fins de combler ce vide juridique, une nouvelle décision d’adéquation fût adoptée avec l’accord des États membres et prit cette fois-ci le nom de « Privacy Shield ». Ce dernier fît ensuite l’objet d’une question préjudicielle de la part de la Cour suprême Irlandaise, à destination de la CJUE, laquelle a rappelé les exigences de l’article 46 du Règlement Général sur la Protection des données et conclu qu’en l’état, le « Privacy Shield » n’était pas conforme au droit de l’Union Européenne.

Cet arrêt rappelle qu’il est nécessaire que la Commission vérifie que le pays tiers puisse garantir des garanties équivalentes – et non pas identiques – ainsi qu’un système d’application de ces garanties ; l’enjeu étant de définir ces garanties équivalentes.

En outre, la CJUE a jugé les clauses contractuelles types valides sous réserve d’apprécier, in concreto, dans quelle mesure, sur le territoire de cet État tiers, les règles du droit applicables offrent les garanties satisfaisantes du droit européen.

Pour rappel, ces clauses permettent d’encadrer le transfert de données à destination des pays en dehors de l’Union Européenne.

Les opérateurs économiques ont la faculté d’introduire ces clauses dans leurs contrats afin de s’assurer que les conditions de transfert, répondent à des prérequis apportant des garanties équivalentes.

En somme, cet outil est conforme au droit européen ; néanmoins cette décision n’exempte pas de procéder à toute vérification tendant à s’assurer qu’en pratique, la garantie des droits est effectivement équivalente, à celle assurée au sein de l’Union Européenne.

Comment faire face, dans l’urgence, à la rupture soudaine par son partenaire, d’un contrat indispensable à son activité ?

La Chambre commercial de la Cour de cassation répond clairement à cette question dans un arrêt du 24 juin 2020 (Cour de cassation, Chambre commerciale, 24 juin 2020, 19-12.261, Inédit).

 

Dans cette affaire, le Groupe Canal + conclu un contrat d’approvisionnement du décodeur futur UHD avec la société TDT. Face à la hausse significative du coût de fabrication des décodeurs et au refus du Groupe Canal + de renégocier ses tarifs, la société TDT notifie par courrier sa décision de résilier le contrat avec préavis de 90 jours. La société TDT, auteur de la résiliation du contrat, s’est vue condamnée sous astreinte de 10.000 euros par infraction constatée à poursuivre l’approvisionnement pendant une durée déterminée.

 

La décision est prise au visa de l’article 873 du Code de procédure civile aux termes duquel le président peut prescrire en référé les mesures conservatoires qui s’imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.

 

En effet, la Cour de cassation considère dans cette affaire, à juste titre, que le juge des référés est compétent pour ordonner, à titre de mesure conservatoire, le maintien de la relation contractuelle dans la mesure où le Groupe Canal + a su démontrer qu’il existait une « possible illicéité » du comportement de la société TDT pour avoir résilié, unilatéralement et brutalement, sa relation contractuelle. La Cour précise également qu’il n’appartient pas au juge des référé de déterminer l’étendue exacte des obligations de la société TDT et, partant, d’apprécier si le dommage imminent était illicite ou fautif.

 

Notre conseil :

 

Dans ces conditions et en application de cette décision, il est vivement conseillé aux entreprises, victimes d’une résiliation soudaine d’un contrat indispensable à la pérennité de son contrat, d’engager deux actions simultanées : la première, en référé, visant au maintien des relations contractuelles à titre conservatoire – la seconde, au fonds, visant à régler les conséquences la rupture brutale des relations commerciales établies.

Nullité du contrat de franchise pour erreur du franchisé sur la rentabilité de l’activité

Dans un arrêt du 10 juin 2020, la Cour de cassation a approuvé la décision des juges du fonds ayant annulé un contrat de franchise pour erreur du franchisé, novice dans le secteur, car le franchiseur lui avait fourni un compte d’exploitation prévisionnel bien trop optimiste et avait validé le choix d’un local d’exploitation inadapté et trop cher (Cour de cassation, Chambre commerciale, 10 juin 2020, 18-21.536, Inédit).

Cette décision rappelle que la rentabilité est le talon d’Achille du contrat de franchise, cette fragilité étant proportionnelle au degré d’inexpérience du franchisé. En effet, si la promesse de rentabilité n’est pas au rendez-vous, alors le franchisé tentera légitimement de remettre en cause la validité du contrat.

En l’espèce, ce fût le cas du franchisé d’autant qu’il était novice dans le secteur.

Il est d’abord reproché au franchiseur d’avoir communiqué au franchisé un compte d’exploitation prévisionnel élaboré sur la base de données erronées et non significatives sans qu’il en ait vérifié la cohérence. Or, ces comptes prévisionnels se sont révélés exagérément optimistes. En outre, l’écart entre ces prévisions et les chiffres réalisés a dépassé la marge d’erreur inhérente à toute donnée prévisionnelle, sans que les mauvais chiffres constatés puissent être imputés au franchisé.

La Cour de cassation a approuvé le raisonnement de la Cour d’appel selon lequel « ces prévisions avaient provoqué, dans l’esprit des cocontractants, novices dans le secteur économique concerné, une erreur sur la rentabilité de leur activité, portant sur la substance même du contrat de franchise, pour lequel l’espérance de gain est déterminante, et que c’est en raison de cette erreur déterminante que le franchisé avait été conduit à conclure le contrat litigieux ».

Il est ensuite reproché au franchiseur de s’être engagé auprès du franchisé de l’assister dans ses démarches de recherche et de négociation d’un local et d’avoir fait preuve, dans l’exécution de cette obligation, d’une grande négligence. En effet, le franchiseur aurait « validé l’emplacement choisi par le franchisé et négocié les conditions du bail, qui s’est avéré inadapté en raison d’une superficie trop vaste et d’un loyer excessif, rendant l’affaire du franchisé non viable. »

La Cour de cassation a considéré que « s’ils n’induisent pas en soi un vice de consentement du franchisé, non seulement démontrent les manquements du franchiseur à ses obligations de conseil mais, en outre, renforcent la portée des informations erronées sur les prévisionnels et les conséquences de l’absence d’état du marché local puisque le coût du bail représente une donnée essentielle en considération de laquelle le franchisé a élaboré son projet d’installation. En cet état, la cour d’appel a pu retenir que l’inadaptation de l’emplacement, la trop grande superficie des locaux et le caractère excessif du loyer, trop élevé pour garantir aux franchisés un taux de rentabilité minimale, ont été également déterminants pour le consentement du franchisé et portaient sur la substance même du contrat de franchise, pour lequel l’espérance de gain est déterminante. »

Nous observons que si le franchiseur avait été vigilent sur l’exécution de son obligation d’assistance, la rentabilité aurait potentiellement été au rendez-vous de sorte que l’incohérence du prévisionnel n’aurait point eu de conséquence.

En tout état de cause, mieux vaut pour le franchiseur ne pas fournir de compte prévisionnel, sauf à émettre les plus expresses réserves.

Quid du prêt ayant financé l’acquisition immobilière en cas d’annulation de la vente ?

La majorité des transactions immobilières sont financées par un crédit immobilier soumis aux articles L. 313-1 et suivants du Code de la consommation.

En application de l’article L. 313-36 du Code de la consommation, la conclusion du contrat principal est une condition résolutoire du contrat de prêt.

Dans ces conditions, la jurisprudence considère que l’annulation du contrat vente, objet du financement, produit les mêmes conséquences que l’absence de conclusion, de sorte que le prêt se trouve annulé de plein droit (Cour de Cassation, Chambre civile 1, du 18 juin 1996, 94-16.456, Publié au bulletin).

Attention :

L’emprunteur peut toujours renoncer à se prévaloir de l’interdépendance entre le contrat de prêt et le contrat principal.

Cependant, la renonciation ne peut résulter que d’un acte positif de nature à la caractériser sans équivoque.

Ce fût le cas dans une affaire soumise à la Cour de cassation ayant approuvé le raisonnement de la Cour d’appel de Paris en ces termes (Cour de Cassation, Chambre civile 1, du 6 janvier 1998, 95-21.205, Publié au bulletin) :

« Mais attendu, d’abord, qu’ayant relevé que M. et Mme X… avaient conservé la disposition de la somme prêtée après restitution par le vendeur en conséquence de la résolution de la vente, en disposant des fonds ainsi reçus à des fins autres que le remboursement de la banque, et alors que celle-ci n’avait pas été attraite par eux à l’instance relative à cette résolution du contrat de vente, la cour d’appel a souverainement estimé qu’ils avaient ainsi manifesté leur volonté de ne pas se prévaloir de l’interdépendance des deux contrats ; que c’est donc à bon droit que la cour d’appel a admis que le contrat de prêt n’avait pas été résolu . »

Dans l’intérêt de l’emprunteur engageant une action en nullité du contrat principal, il est vivement recommandé de traiter dans une seule et même instance la question de la vente et du prêt afin d’éviter tout débat relatif à la renonciation à se prévaloir de l’interdépendance du prêt et de la vente.