[Résumé]

Dans une décision en date du 15 décembre 2021, la chambre commerciale de la Cour de cassation souligne que dans une SARL la demande de désignation d’un mandataire chargé de convoquer une assemblée générale ayant pour ordre du jour la révocation du gérant doit appréciée au regard de l’intérêt social.

(Cour de cassation, civile, Chambre commerciale, 15 décembre 2021, 20-12.307, Publié au bulletin)

[Rappel des faits et de la procédure]

En l’espèce, l’associée majoritaire d’une société à responsabilité limitée a demandé à son gérant et coassocié la convocation d’une assemblée générale ayant pour ordre du jour la décision à prendre sur la révocation du gérant et la désignation d’un nouveau gérant.

Devant le refus du gérant, l’associé majoritaire a saisi en la forme des référés le président d’un tribunal de commerce afin d’obtenir la désignation d’un mandataire chargé de convoquer l’assemblée générale. Le dirigeant et la société se sont opposés à cette demande.

Les juges du fond acceptèrent la désignation. La société et le dirigeant formèrent alors un pourvoi en cassation.

La Haute juridiction énonce au terme de son contrôle que : « Si c’est à tort que la cour d’appel a énoncé que le juge, saisi par un associé détenant au moins la moitié des parts sociales d’une société à responsabilité limitée d’une demande de désignation d’un mandataire chargé de convoquer une assemblée générale ayant pour ordre du jour la révocation du gérant, n’a pas à apprécier cette demande au regard de l’intérêt social, sa décision n’encourt pas pour autant la censure dès lors que les allégations [ du dirigeant ], selon lesquelles la demande de [l’associé majoritaire] n’était pas conforme à l’intérêt social, n’avaient, en réalité, pour objet que de contester les motifs de la révocation envisagée ».

[L’avis du Cabinet]

Quelle que soit la forme sociale, il existe un principe de libre révocabilité des dirigeants sociaux. Une société ne saurait être tenue de conserver un dirigeant, même lorsque comme dans les SARL sa révocation doit être soutenue par de justes motifs. Or la révocation du gérant doit faire l’objet d’une décision sociale. En somme, c’est l’assemblée qui décide à la majorité. Il n’en reste pas moins que l’initiative de la convocation d’une telle assemblée est aux mains du dirigeant. On peut concevoir qu’il fasse preuve de réticence dans la mesure où il s’agit de sa propre révocation.

Pour pallier cette situation il est possible – comme c’était le cas en l’espèce – pour un associé de solliciter judiciairement la désignation d’un mandataire ad hoc ayant pour mission de convoquer l’assemblée en question. C’est l’objet de l’article L. 223-27 du code de commerce prévoit en effet que « Tout associé peut demander en justice la désignation d’un mandataire chargé de convoquer l’assemblée et de fixer son ordre du jour ».

En l’occurrence la Haute juridiction vient souligner que cette demande doit être appréciée à la lumière de l’intérêt social. Cette demande ne saurait donc prospérer faute de conformité à cet intérêt. En l’espèce, en dépit du rappel à l’ordre effectué par la Chambre commerciale, l’arrêt n’est pas censuré dans la mesure où les demandes du dirigeant et de la société n’avaient, en réalité, pour objet que de contester les motifs de la révocation envisagée.

Appréciation, à l’aune de l’intérêt social, d’une demande de désignation d’un mandataire ad hoc

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