Bail commercial : la notion du droit de préemption du preneur

1. Définition du droit de préemption du locataire

Le locataire d’un local commercial ou artisanal bénéficie d’un droit de préemption.

Autrement dit, si le bailleur décide de vendre ledit local, le locataire est prioritaire pour l’acquisition par rapport aux tiers (article L.145-46-1 du Code de commerce).

Cette disposition est d’ordre public : cela signifie que le contrat de bail commercial ne peut exclure ce droit de préemption du locataire.

2. Mise en œuvre du droit de préemption du locataire

2.1. Obligation pour le bailleur de notifier au locataire son intention de vendre le local

Le bailleur a l’obligation de notifier au locataire son intention de vendre le local par lettre recommandée avec demande d’avis de réception, ou remise en main propre contre récépissé ou émargement.

A peine de nullité, cette notification doit impérativement indiquer le prix et les conditions de la vente envisagée et reproduire les quatre (4) premiers alinéas de l’article L.145-46-1 du Code de commerce.

Cette notification vaut offre de vente au profit du locataire.

L’absence de cette notification par le bailleur est considérée comme une violation du droit de préemption du locataire.

Focus sur le moment de la notification au locataire :

Afin de respecter le droit de préemption du locataire, cette notification doit intervenir avant la vente du local auprès du tiers acquéreur. En revanche, cette notification peut intervenir postérieurement à la conclusion d’une promesse unilatérale de vente sous la condition suspensive d’absence d’exercice de son droit de préférence par le locataire (Cour de cassation, troisième chambre civile, 23-09-2021, n°20-17.799).

2.2. La réponse du locataire à la notification du bailleur

Le locataire dispose d’un délai d’un (1) mois à compter de la réception de cette offre pour se prononcer :

– Si le locataire décline l’offre : le bailleur peut procéder à la vente du local auprès d’un tiers,

– Si le locataire ne répond pas à l’offre dans le délai d’un (1) mois : l’offre devient caduque et le bailleur peut procéder à la vente du local auprès d’un tiers,

– Si le locataire accepte l’offre : le locataire dispose d’un délai de deux (2) mois pour conclure la vente avec le bailleur. S’il compte recourir à un prêt, il doit il doit l’indiquer au Bailleur, le délai de réalisation de la vente est alors porté à quatre (4) mois. Si, à l’expiration de ce délai de quatre (4) mois, la vente n’a pas été réalisée, l’acceptation de l’offre de vente est sans effet.

2.3. Lorsque le bailleur décide de vendre son local à un tiers à des conditions plus avantageuses que celles notifiées au locataire

S’il apparait que finalement, le bailleur décide de vendre le local à des conditions ou à un prix plus avantageux à un tiers acquéreur, le bailleur ou le notaire doit notifier au locataire, ces conditions et ce prix à peine de nullité de la vente.

Cette notification doit respecter les formes et conditions visées au 2.1 du présent article.

Cette notification vaut également offre de vente au profit du locataire qui doit répondre dans le délai d’un (1) mois.

Le 2.2 du présent article s’applique à cette notification.

3. Sanction en cas de non-respect du droit de préemption du Locataire

Le non-respect du droit de préemption du Locataire est la nullité de la vente effectuée en violation de ce droit (Cour de cassation, troisième chambre civile, 14-11-2012, n°11-22.433).

Cette action en nullité doit être introduite par le locataire dans un délai de deux (2) ans à compter de la notification de la cession au tiers acquéreur devant le Tribunal Judiciaire du lieu de situation de l’immeuble.

4. Exception au droit de préemption

Néanmoins, il résulte du dernier alinéa de l’article L.145-46-1 du Code de commerce que ce droit de préemption du n’est pas applicable si l’on se trouve dans l’une des hypothèses suivantes :

– cession unique de plusieurs locaux d’un ensemble commercial,

– de cession unique de locaux commerciaux distincts,

– de cession d’un local commercial au copropriétaire d’un ensemble commercial,

– cession globale d’un immeuble comprenant des locaux commerciaux,

– cession d’un local au conjoint du bailleur, ou à un ascendant ou un descendant du bailleur ou de son conjoint.

Avant d’engager toute action contentieuse en nullité de la vente du local en violation de son droit de préemption, le locataire doit donc vérifier que la vente du local n’entre pas dans l’une de ces hypothèses.