[Résumé]

Dans une décision en date du 24 novembre 2021, la Chambre commerciale de la Cour de cassation contrôle une clause aux termes de laquelle le cédant conservait une partie de cession déjà versée en cas de résolution de la vente. Elle estime « que cette clause n’avait pas pour objet de permettre au cédant de percevoir deux fois le prix des parts sociales mais seulement de lui permettre, en cas de résolution de la cession desdites parts, de conserver les sommes déjà versées par le cessionnaire à titre de paiement partiel ».

(Cass. com., 24 nov. 2021, n° 19-24977)

[Rappel des faits et de la procédure]

En l’espèce une cession de parts sociale prévoyait le paiement en douze annuités. Le contrat de cession stipulait qu’ « à défaut de règlement d’une seule annuité aux dates et montant convenus, l’intégralité du prix de cession deviendra immédiatement exigible et les sommes versées jusqu’au défaut de règlement, seront allouées au cédant, à titre de premiers dommages et intérêts lequel pourra poursuivre comme bon lui semble le cessionnaire, soit en paiement du solde du prix de cession, soit en résolution de la vente assortie de dommages et intérêts ».

Invoquant la défaillance du cessionnaire dans le paiement du prix, le cédant l’a assignée en résolution de la cession et aux fins d’application de la clause pénale insérée dans le contrat.

Les juges du fond rejetèrent l’application de la clause pénale. Le cédant forma alors un pourvoi en cassation. La Chambre commerciale de la Cour de cassation censure l’arrêt d’appel et livre l’analyse suivante : « cette clause n’avait pas pour objet de permettre au cédant de percevoir deux fois le prix des parts sociales mais seulement de lui permettre, en cas de résolution de la cession des dites parts, de conserver les sommes déjà versées par le cessionnaire à titre de paiement partiel ».

[L’avis du Cabinet]

Les cessions de titres font l’objet d’aménagement contractuel qui permettent de satisfaire les intérêts des parties en présence. Le prix de cession est à ce titre un enjeu crucial et l’objet d’intenses négociations. La question de son paiement est d’égale importance. S’il est intéressant d’obtenir un bon prix, cela ne tient qu’à son paiement effectif. Pour ce faire, les parties au présent contentieux avaient prévu un paiement échelonné en douze annuités. En sus de cet étalement du paiement, les parties avaient insérée à l’acte une clause selon laquelle à défaut de règlement d’une seule annuité aux dates et montant convenus, l’intégralité du prix de cession deviendrait immédiatement exigible et les sommes versées jusqu’au défaut de règlement, seraient allouées au cédant, à titre de premiers dommages et intérêts lequel pourrait poursuivre comme bon lui semble le cessionnaire, soit en paiement du solde du prix de cession, soit en résolution de la vente assortie de dommages et intérêts.

A la faveur d’un défaut de paiement, le cédant avait excipé la clause. Les juges du fond leur en avaient pourtant refusé le bénéfice. Pour eux, la mise en œuvre de cette clause obligeait le cessionnaire à régler une deuxième fois le prix des parts sociales sans cependant pouvoir en avoir le bénéfice.

Au visa de l’obligation pour le juge de ne pas dénaturer l’écrit qui lui est soumis, la Haute juridiction censure. L’objet de la clause n’était en aucun cas de prévoir un double paiement mais de permettre la conservation des sommes déjà versées en cas de défaillance. Cette sanction contractuelle par le jeu d’une clause pénale était donc parfaitement admissible, sauf pour le juge à en constater l’excès. Ce qui notons le ne lui auront finalement permis que de ramener la clause à de justes proportions, conformément à l’article 1231-5 du code civil.

Application d’une clause pénale dans une cession de titres sociaux

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